Asian Connection, l'émission sur les cultures asiatiques - Radio Campus 88.1 - Mardi 19h/20h


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Leslie Cheung


L’immense acteur de Hong Kong Leslie Cheung nous a quitté le 1er Avril 2003. Il a décidé de mettre fin à ses jours après une longue période de dépression. Nous sommes extrêmement touchés par sa disparition car nous aimions beaucoup cet acteur.

Leslie Cheung, de son vrai nom : Leslie Cheung Kwok-Wing est né à Hong Kong en 1956. Son premier amour, c’est la chanson. En 1977, il arrive second à un concours, l’Asia Singing Competition. Il tourne aussi dans quelques séries TV et chante des génériques. En 1983, il obtient un énorme succès grâce à son premier album qui fait de lui une star.
1986 est aussi une date très importante pour lui car il triomphe dans un de ses premiers vrais rôles de cinéma : il incarne Kit dans « Le syndicat du crime » de John Woo.
Dés lors, il va mener deux carrières de front, celle de chanteur reconnu et adulé par des milliers de fans et celle d’acteur très doué, sans doute le meilleur de sa génération. Il va ainsi tourner dans plus de 60 films sous la direction des plus grands réalisateurs de l’archipel Hong Kongais. Il a joué sous la direction de John Woo à trois reprises dans « Le syndicat du crime 1 et 2 » et plus tard dans « Once a Thief », il a été également dirigé par Tsui Hark dans le sur vitaminé
« Le festin chinois », par Chen Kaige avec la palme d’or « Adieu ma concubine ». On le retrouve aussi au générique de « The bride with white air » de Ronny Yu, de « Shanghai Grand » de Poon Man Kit, des deux premiers épisodes d’ « Histoires de fantômes chinois » du très acrobatique Ching Siu Tung.
Mais Leslie cheung s’est surtout illustré dans trois films de Wong Kar-wai, on le retrouve donc dans les castings de « Nos années sauvages », des « Cendres du temps » et de « Happy Together », prix de la mise en scène de Cannes en 1997.

 

Leslie Cheung s’est fait un nom grâce au succès sans précédent du « Syndicat du crime » de John Woo. Son personnage est dans le plus pur style de Woo, à la fois fort et fragile, à la fois intelligent et naïf. Ce qui frappe aussi à l’écran c’est son charisme et sa beauté juvénile. Leslie Cheung restera sans doute à jamais comme l’éternel jeune homme du cinéma Hong Kongais.
Son personnage est très attachant et les rapports qu’il entretient avec son frère ne sont pas faciles. Kit n’est pas un rôle comme les autres, ça va au

delà du film d’action, au delà du film de gangsters. La portée dramatique est telle que John Woo transforme son polar en une ode à l’amitié, à la fraternité et au dépassement de soi. Leslie Cheung, mais aussi Chow Yun Fat et Ti Lung explosent dans des rôles sur mesures qui feront la renommée mondiale de ce film désormais culte.

Un an plus tard Leslie Cheung retrouve le personnage Kit dans la suite du « Syndicat du crime ». Ce film extrêmement sombre fournit à Leslie une nouvelle occasion pour surprendre son public. La scène dans laquelle il se fait tirer dessus par son frère emmène le spectateur dans des marécages d’émotions. Tout ce qui arrive dans le film est dicté par une fatalité implacable et les personnages atteignent souvent le point de non-retour. Ces deux grand films de John Woo prouvent au public que Leslie Cheung est un grand acteur.


Leslie est capable de tout jouer, sa carrière est une vaste audace qui lui rend constamment hommage. Il s’essaye alors au film de légende chinoise avec les deux premiers volets d’ « Histoires de fantômes chinois » sortis en 1989 et 1990 sous la direction de Ching Siu Tung, le réalisateur de « Duel to the Death ». La réussite est au rendez-vous, l’acteur y incarne un jeune homme naïf et amoureux très touchant. Leslie ne tournera pas dans « Histoires de fantômes chinois 3 », il sera remplacé par Tony Leung Chiu Wai. En 1990 il participe à son premier Wong Kar Wai « Nos années sauvages » dans lequel il excelle.

Once a thief
L’année d’après il renoue avec le savoir faire de John Woo et s’envole pour la France afin de tourner dans « Once a Thief ». Il y joue un voleur d’œuvres d’arts aux côtés de Chow Yun Fat et Cherry Cheung. Les trois personnages forment un trio amoureux qui va devoir déjouer tous les pièges et embûches placés sur leur passage. Le film est très agréable à voir et les acteurs respirent une joie de vivre communicative. Les fusillades

sont nombreuses, les cascades sont multiples et Leslie Cheung est vraiment à l’aise faisant preuve d’une agilité insoupçonnée. John Woo semble réellement amoureux de ses acteurs et leur rend bien, tant le film est accrocheur.

Leslie Cheung enchaîne avec « The Bride with white air » de Ronny Yu, un film de sabre puis avec « Adieu ma Concubine » de Chain Kaige qui révèle Leslie Cheung sur la scène internationale. Mais ce dernier ne quittera jamais l’industrie du cinéma de Hong Kong. Il refusera donc plusieurs projets occidentaux et ne suivra pas les parcours de John Woo et de Chow Yun Fat.

En 1993, Leslie annonce publiquement son homosexualité, ce qui est rare et courageux à Hong Kong, société très conservatrice. Après « He is a woman, she is a man » titre très évocateur, il rempile pour un second film de Wong Kar Wai : « Les cendres du temps », un Wu Xia Pan qui casse avec tous les codes du genre. Ce film ne ressemble à aucun autre et la narration est déconstruite, croulant sous une multitude de monologues intérieurs. Ce film très esthétique est aussi l’occasion de retrouver toute une génération d’acteurs dans un casting frôlant la perfection. Une expérience à part qui a le mérite d’être parfaitement originale.

Après le succès de « Once a Thief » en 1991 pour le nouvel an Chinois, Leslie retrouve la comédie d’action pour le nouvel an de 1995 en tournant sous la houlette de Tsui Hark. « Le festin chinois » sort sur les écrans de Hong Kong en 1995 et reste comme le plus gros succès public de Tsui Hark. Cette comédie dynamique, filmée avec dextérité nous plonge dans le monde culinaire d’une manière surprenante et réjouissante. Ce film donne faim et Leslie Cheung est parfait dans un rôle qui lui va comme un gant. De toute façon, il est toujours au top et sa crédibilité n’a jamais pu être remise en
le festin chinois

question. « Le festin chinois » est un film que nous vous recommandons vivement, c’est du bonheur à tous les étages.

L’année suivante Leslie Cheung fait un come back réussi dans le film noir en jouant dans la fresque mafieuse « Shangai Grand » réalisée par Poon Man kit. Trahison, règlements de comptes et violence extrême sont au rendez-vous pour un film d’une noirceur viscérale. Leslie Cheung prend son public à contre pied et triomphe une fois de plus.

 

Happy Together
Ceci nous emmène en 1997, année marquée par le chef d’œuvre de Wong Kar wai, j’ai nommé : « Happy Together ». Leslie Cheung et Tony Leung forment un couple homosexuel exilé à Buenos Aires. Cette histoire d’amour a tout pour émouvoir, la trame narrative et les thèmes abordés se situent loin des clichés du film gay de base. Comme à son habitude, Wong Kar Wai sait proposer autre chose que ce que l’on a l’habitude de voir. Visionner ce film après le décès de Leslie est vraiment troublant tant son rôle paraît proche de la
réalité.
Le personnage de Tony Leung est psychologiquement plus fort et apte à surmonter les épreuves. A côté, l’exubérance du personnage de Leslie cache en fait une fragilité à fleur de peau, il apparaît plus démuni et désarmé face à l’adversité. Il a constamment besoin d’être entouré, il ne supporte pas d’être seul, il ne peut pas envisager le moindre instant de solitude.
Dans le film, Wong Kar wai introduit un troisième personnage : Zhang, ce dernier se situe à l’opposée de celui joué par Leslie. Il aime à voyager seul même s’il sait se montrer très sociable par moment. Fai, le personnage de Tony Leung, se trouve au milieu des deux extrêmes, même s’il souffre énormément, il arrivera toujours à se remettre en question et à repartir à zéro. Repartir à zéro est impossible pour le personnage de Leslie qui vit à la merci de ses sentiments. Le final du film nous pousse dans le malaise et l’analogie avec la vie réelle de Leslie Cheung saute aux yeux. On peut se demander quelle est la part d’autobiographie que Leslie Cheung a apporté à son personnage d’ange déchu. Mieux comprendre l’acteur à travers ce film est possible pour le spectateur car Wong Kar wai et Leslie Cheung lui même ont introduit un grand nombres d’indices qui sont aujourd’hui troublants.

La fin du siècle dernier et le début du nouveau ont plongé Leslie Cheung dans une phase de dépression importante dont il ne sortira pas indemne. Après un dernier rôle dans le thriller « Inner Senses » qui lui vaudra une nomination aux Hong Kong awards, Leslie a choisi de partir en nous laissant d’impérissables souvenirs. Acteur brillant et audacieux, chanteur charismatique, il va nous manquer, c’est certain. Son décès très peu relayé par la presse française est une épreuve difficile à accepter tant cet acteur avait su nous faire vibrer.

Par Nicolas Loubère

 

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