Asian Connection, l'émission sur les cultures asiatiques - Radio Campus 88.1 - Mardi 19h/20h


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Andy Seto

Il était là, costume cravate, dédicaçant à tour de bras, pendant trois jours, toujours souriant, jamais lassé. C’était début Novembre 2002 au festival Cartoonist de Paris. Cet homme qui prône la gentillesse, l’amabilité, et l’ouverture d’esprit n’est autre que le dessinateur Hongkongais Andy Seto.

Andy Seto n’est pas un mangaka, pourtant son travail n’est pas trop éloigné du manga mais il n’est pas japonais, voilà ce qui explique cela. De plus, Andy Seto travaille et aime travailler la couleur qu’il contrôle de A à Z, sa liberté est quasi-totale. La couleur apporte vraiment quelque chose de nouveau dans les publications asiatiques. Lorsqu’on parle des œuvres d’Andy Seto, on parle davantage de comics. Mais attention, rien à voir avec les comics américains. Pour Andy Seto, les comics d’outre Atlantique se ressemblent tous les uns aux autres et les histoires gravitent essentiellement autour des héros.

Andy Seto est le bdéiste phare des années 90 à Hongkong, on peut même penser qu’il a révolutionné le genre. Lorsqu’il sort le premier volume de Cyber Weapon Z à Hongkong en 1993, le succès ne s’est pas fait attendre et deux ans plus tard une édition française voyait le jour, chez Tonkam. Toutes ses histoires sont liées avec le monde des arts martiaux.

Andy Seto aime les arts martiaux comme John Woo aime les armes, c’est à dire qu’il apprécie fortement leur rendu visuel mais il ne pratique pas. Cyber Weapon Z est centré sur les techniques martiales et raconte comment développer l’être humain, comment accomplir ce développement pour se parfaire. Andy Seto rend hommage aux grands films d’arts martiaux et aux grandes séries vidéo-ludiques comme Street Fighter dont il s’est inspiré.

Aujourd’hui, les quatre premiers tomes de son œuvre The King of Fighters Zillion sont sortis en France chez Tonkam dans une somptueuse édition toute en couleur. L’adaptation de ce célèbre jeu vidéo compte 15 volumes au total et revient sur l’affrontement éternel entre Kyo Kusanagi et Iori Yagami.

Le style graphique est très beau et les couleurs très bien choisies. Andy Seto n’a en aucun cas trahi l’univers du jeu vidéo culte et les personnages sont aussi intéressants que dans le soft de SNK. Les effets de flammes et d’explosions atteignent un degré de qualité supérieure. En effet, et on ne le répétera jamais assez, Andy Seto maîtrise la couleur comme personne. Dans la plupart des bd américaines, la couleur tue le trait de crayon car elle est trop uniforme, trop numérique et plutôt vulgaire. Ici, elle reste au service du trait, elle renforce sa complexité et fait ressortir le moindre détail. Les encrages sont magnifiques et on a plus à faire à une gravure qu’à un dessin de manga classique, un peu comme pour Gunnm où les ombres ne sont pas constituées de simples trames mais réalisées très soigneusement à la plume.

Même si les dessins ne sont pas toujours parfaits, Andy Seto maîtrise son sujet et le rendu visuel est assez impressionnant. Au début du premier tome de The King of Fighters Zillon, Kyo Kusanagi et Iori Yagami se battent dans la neige. Le rendu graphique des montagnes enneigées est tout simplement sublime et original. Chaque vignette est une œuvre artistique à part entière. Au fil des pages, on peut tout de même affirmer qu’Andy Seto est plus à l’aise dans le dessin des personnages masculins que féminins. En effet, Mai Shiranui, parfois magnifique, n’est pas toujours réussie, on lui préférera Chizuru Kagura et son joli minois qui semble plus convenir à la plume du dessinateur.

Le style artistique de Seto se rapproche beaucoup du manga japonais et l’auteur affirme vouer une admiration sans limite au mangaka Yusuhiko Yoshikazu à qui l’on doit Orion ou Venus Wars. Il considère ce dessinateur japonais comme un guide et pense que ses mangas sont fabuleux et inestimables. Mis à part Yoshikazu, Andy Seto apprécie aussi le style de Masamune Shirow. Pour l’auteur de The King of Fighters Zillion, Shirow détient la vraie vision du futur. Shirow, c’est l’union parfaite entre la technologie et le beau, le créateur d’un monde singulier et personnel.

En fait, ce qui caractérise Seto, c’est son ouverture d’esprit. Il peut aimer le travail de Shirow d’un côté et de l’autre respecter celui de Rumiko Takahashi par exemple. Il trouve que les réalisations de la célèbre autrice de Ranma ½ sont à la fois drôles et amusantes, tristes et excitantes. Si les arts martiaux sont au cœur des publications d’Andy Seto, les histoires ne sont pas en reste et donnent la part belle à l’honneur, à la trahison et au dépassement de soi. Le tome n°1 de The King of Fighters Zillion possède une trame scénaristique très intéressante et le désir d’en savoir plus est constamment présent. La réussite graphique s’allie à merveille avec l’histoire riche en rebondissements.

De plus, les fans du jeu vidéo qui a inspiré cette BD de Hongkong ne seront pas déçus car l’auteur a respecté scrupuleusement les coups spéciaux des combattants et on retrouve à peu près toutes les attaques de chacun. Les traductions françaises de certaines techniques de combat peuvent parfois surprendre. Ainsi on peut lire : « le feu démoniaque », « l’attaque des 8 calices de saké », « la tornade du triple écho », « l’éventail du papillon », « la danse du phénix » et bien d’autres encore.

Pour Andy Seto, les mangas ne subissent pas la pression habituelle imposée par notre société, ils peuvent donc se développer librement et créer de nombreuses formes d’histoires différentes, chose qui n’est pas le cas dans les Bd chinoises au contenu limité. Andy Seto, lui, fait du manga sans être un mangaka et c’est tant mieux car on peut facilement penser que si son style ne se rapprochait pas du style japonais, jamais nous n’aurions pu lire, en France, ses œuvres qui ne sont pas dénuées d’intérêt.

On peut rendre hommage à Tonkam pour sa luxueuse publication même si on peut rencontrer par si par là des petites erreurs de traductions. C’est simple, l’objet en lui même est tellement beau, qu’on se surprend presque à mettre des gants pour ne pas abîmer The King of Fighters Zillion. Si cette chronique vous a donné envie de lire les œuvres d’Andy Seto, sachez que ce fan de Terminator, de Steven Spielberg et de Chow Yun Fat est en train de travailler sur une BD adaptée du roman dont est tiré le célèbre film Tigre et Dragon, ce qui est une excellente nouvelle.

Par Nicolas Loubère

 

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